LA SIM BAY



Vue de la SIM bay du vol Apollo XVII


La SIM bay (Scientific Instrument Module) des missions Apollo "J" est située dans le secteur 1 du module de service. Elle partage cet espace avec le troisième réservoir d'oxygène cryogénique, ajouté aprés l'incident du vol Apollo XIII.
Cette plateforme d'observation transporte huit expériences :
• un détecteur de fluorescence des rayons X ;
• un spectromètre à rayon gamma et son antenne de 7,6 m ;
• un spectromètre à particules alpha ;
• une caméra panoramique ;
• une caméra cartographique ;
• un altimètre laser ;
• un spectromètre de masse ;
• un micro-satellite.
Les expériences de la SIM bay sont contrôlées via le panneau 230 situé dans le CM.



LE MATÈRIEL



Le détecteur de fluorescence des rayons X :
Il fait partie du trio d'expériences géochimiques pour analyser la composition de la surface lunaire depuis l'orbite. Il détecte la fluorescence des rayons X générée par l'interaction des rayons solaires avec la Lune, analysant la partie ensoleillée sous le vaisseau spatial par bandes.

Le spectromètre à rayons gamma :
Monté sur une perche extensible de 7,62 m, il mesure la composition chimique de la surface lunaire en complément des expériences sur les rayons X et les particules alpha, pour créer une carte des éléments chimiques à la surface de la Lune. Il mesure des gammes d'énergie de 0,1 à 10 millions d'électronvolts.

Le spectromètre à particules alpha :
Il détecte les particules alpha mono-énergétiques émises de la croûte lunaire et de ses fissures, comme les produits isotopiques du radon (gaz). Son spectre d'énergie va de 4,7 à 9,3 millions d'électronvolts. Le détecteur est constitué de 10 détecteurs à barrière extérieure en silicium.

La caméra panoramique :
Elle prend des photos haute résolution (1 m) avec une couverture de 11,4 x 114,8 cm et un champ de 11° x 108°. Les films sont récupérés après le retour de la mission par le pilote du CM.



La caméra cartographique :
Elle dispose d’un objectif de 75 mm et permet de photographier la Lune avec une résolution de 20 m. Un appareil photo complémentaire prend des images du champ stellaire sur film 35 mm à 96° de l'axe optique. Les bobines sont récupérées par le CMP, tout comme celles de la caméra panoramique.

L'altimètre laser :
Il mesure l'altitude du vaisseau spatial au-dessus de la surface lunaire avec une précision inférieure à un mètre. En tandem avec la caméra cartographique de 75 mm, il fournit des données de corrélation d'altitude. Le laser à rubis émet des impulsions de 200 millijoules et 10 nanosecondes, avec un taux de répétition allant jusqu'à 3,75 impulsions par minute.

Le spectromètre de masse :
Il tente de mesurer la composition et la répartition de l'atmosphère lunaire. Monté sur une perche extensible de 7,31 m, il analyse l'environnement gazeux de la Lune.

Le micro-satellite (sub-satellite) :
Dénommé PFS-1 (Particles and Fields Subsatellite), ce cylindre hexagonal mesure 78,73 cm (31 in) de long, avec des côtés de 35,55 cm de longueur égale. Il pèse 35,60 kg et est équipé de trois perches extensibles de 1,5 m, dont l’une porte un magnétomètre et les deux autres des masses inertes servant à l'équilibre du satellite. Les six faces du satellite sont recouvertes de panneaux solaires, produisant environ 24 W d'énergie en lumière solaire directe, et 14 W en moyenne pendant une orbite. Il contient aussi 11 batteries argent-cadmium et ne dispose pas de système de propulsion.
Le satellite est éjecté du compartiment SIM en orbite lunaire par un mécanisme à ressort contrôlé par le panneau 230, ce qui lui donne une rotation. Il possède un amortisseur d’oscillations pour réduire la précession et les mouvements parasites durant son déploiement. Une antenne en bande S permet la communication avec la Terre, avec un débit de transmission de 128 bits/s. Il est également équipé d'une mémoire à noyau magnétique pour stocker 49 152 bits lorsque la transmission directe n'est pas possible.

Le satellite emporte trois expériences :

• Un transpondeur en bande S : il permet de suivre avec précision le vaisseau spatial et d’obtenir une carte détaillée du champ gravitationnel lunaire, y compris des mascons. Grâce aux données de poursuite Doppler et des données de suivi du CSM et du LM, des informations sur le champ gravitationnel de la face cachée de la Lune sont collectées. Des variations subtiles de la vitesse du vaisseau sont mesurées avec une résolution de 0,65 mm/seconde.

• Un détecteur de particules Shadows/Boundary : il mesure la densité et l'énergie des électrons et des protons dans le voisinage de la Lune, avec des taux qui varient selon la position de la Lune dans le champ magnétique terrestre et l'activité solaire. L'expérience sur le plasma et les particules permet de surveiller les différents régimes de plasma dans lesquels la Lune se déplace, de déterminer comment la Lune interagit avec les champs et les plasmas dans ces régimes, et d'étudier la structure et la dynamique de la magnétosphère terrestre.

• Un magnétocompteur (ou magnétomètre : servant à mesurer la force et l'orientation de n'importe quel champ magnétique). il mesure les composantes permanente et induite du champ magnétique lunaire en cartographiant systématiquement le champ magnétique rémanent de la Lune et en mesurant les effets magnétiques des interactions entre les plasmas cislunaires et le champ lunaire. Il mesure les variations du champ magnétique associé à plusieurs grands cratères lors de son passage. Les données recueillies montrent que le vide de plasma qui se forme derrière la Lune lorsqu'elle est dans le vent solaire s'étend probablement jusqu'à la surface lunaire, et que le flux du vent solaire est lui-même assez fortement perturbé près des limbes de la Lune. Des anomalies magnétiques ont été trouvés et localisée au voisinage du cratère Reiner Gamma et Van De Graaff.


Croquis du micro satellite

Photo prise lors de son montage

Les micro satellites introduisent une complication supplémentaire dans les procédures déjà complexes des missions de type J.
Les scientifiques souhaitaient éviter de les placer sur la même orbite que le CSM, car, sans propulsion, leur orbite aurait rapidement été perturbée par le champ gravitationnel lunaire, réduisant leur durée de vie à quelques semaines. Une manœuvre supplémentaire a donc été nécessaire pour modifier l'orbite du CSM, réalisée 2 heures et demie avant la TEI, et exigeant une mise à feu du SPS pendant environ 3 secondes. Ce faisant, l'orbite passe de 96,7 km à 121,1 x 140,9 x 100,6 km. Une fois que le CSM atteint la face cachée, le CMP commande le Verb 49 à l'AGC, plaçant ainsi le CSM dans une position optimale pour la libération du micro-satellite. Le mécanisme d'éjection lui confère également une rotation pour assurer une stabilité et un éclairage suffisant de ses panneaux solaires. Pendant cette manœuvre, le RCS du CSM est désactivé pour éviter toute perturbation.

Les micro-satellites ont principalement permis d’avoir une bonne compréhension de l'interaction entre le vent solaire et la Lune, ainsi que de cartographier le champ magnétique résiduel représenté par certaines zones de notre satellite naturel, grâce aux magnétomètres embarqués.

Le saviez-vous? : Le Verb 49 active la routine informatique qui peut être utilisée pour entrer une attitude souhaitée dans l'ordinateur, puis utilisée comme référence pour voler dans cette attitude. Ce mode de manœuvre fonctionne sur trois axes.

Anecdote :
Les vols Apollo XV et Apollo XVI avaient un SIM bay similaire (les 8 expériences étaient les mêmes). Pour le dernier vol Apollo, le XVII on changea trois appareillages :
• le mini satellite et le spectromètre de masse par un sondeur lunaire.
• le spectromètre à rayons gamma par un spectromètre à ultra-violet.
• Le spectromètre à particules alpha par un radiomètre à balayage infrarouge.

Le sondeur lunaire :
Cette expérience utilise un radar à synthèse d'ouverture pour étudier la surface et l'intérieur de la Lune. Les impulsions électromagnétiques rayonnent vers la surface lunaire à haute fréquence (HF) et les bandes à trés haute fréquence (VHF) fournissent des données enregistrées pour développer un modèle géologique de l'intérieur lunaire jusqu'à une profondeur de 1,3 kilomètre (4280 pi). En plus des données stratigraphique, structurales, tectoniques et topographiques sur des régions de la Lune débordée par Apollo 17, le sondeur lunaire mesure les niveaux de bruit électromagnétiques ambiants dans l'environnement lunaire compris entre 5,15 et 20 mégahertz et l'occultation par la lune des ondes électromagnétiques produites à la surface lunaire par l'émetteur expérimental électrique. Il n'est pas possible de le faire fonctionner simultanément en VHF et HF. Le système entier pèse 43 kg et requiert 103 W de puissance. L'électronique se trouve à l'intérieur du module de service. L'ensemble se compose du radar CSAR (Coherent Synthetic Aperture Radar), d'un enregistreur optique, d'une antenne dipôle dont les deux moitiés sont rétractables sur les deux côtés du module service lui-même et d'une antenne Yagi utilisée pour le VHF qui est arrimée à proximité du SPS et est ensuite déployée en position après le lancement.

Le radiomètre à balayage infrarouge :
Son but est de mesurer les températures pendant la de nuit lunaire et ses taux de refroidissement.


Le spectromètre à ultra-violet : Il est employé afin d'essayer de mesurer les émissions ultra-violettes de l'atmosphère rare lunaire. Le spectromètre est monté sur l'étagère inférieure de la SIM bay et a une cloison externe qui limite la lumière parasite. Des commandes pour activer et mettre l'expérience hors tension ainsi que pour l'ouverture et la fermeture du dispositif de protection est situées dans le CM.

En outre sont montés dans la SIM bay l'appareil photo panoramique, l'appareil photo cartographique et l'altimètre laser.

Photos et schéma de la SIM bay du vol Apollo XV (Apollo XVI possède la même) :


Avant le vol

Pendant le vol

Ci-dessous la SIM bay et les nouveaux appareillages du dernier vol Apollo (XVII) :


Photo du radiomètre à balayage infrarouge

Photo du spectromètre à UV

Spectromètre à UV

Panneau avant du sondeur optique lunaire

Radiomètre à balayage infrarouge

Pour récupéré les films de la caméra cartographique et panoramique, c'est le CMP qui effectue une EVA (sortie extravéhiculaire) lors du voyage de retour.
Ci-dessous les schémas de l'équipement nécessaire (en plus du scaphandre pressurisé) pour l'EVA, ainsi qu'une figure du procédé.


Ombilical et nécessaire pour EVA (CMP)

OPS

Schéma montrant l'emplacement des hommes et du matériel lors de l'EVA

Une vue d'artiste du CMP (Al Worden) regardant son équipier (James Irwin) lors du vol Apollo XV et une photo de Ron Evans récupérant les bobines de films (Apollo XVII).



A savoir : en général, la paroi de protection de la SIM bay est éjectée 4,5 h avant le LOI (Lunar Orbit Insertion pour injection sur orbite lunaire).

Ci-dessous un schéma d'utilisation des quads RCS lors des différentes phases en rapport avec les expériences de la SIM bay.





Traduction de l'anglais (Apollo XV, XVI, XVII Lunar Orbital Science), texte de Paul Cultrera, tous droits réservés.